dimanche 28 juin 2015

IL EST IMPORTANT DE BIEN (S') HYDRATER

Tout le monde a besoin d'eau pour vivre. Normal: nous sommes constitués d'environ 60% d'eau. Nous sommes donc plus liquides que solides...
Pour les animaux, c'est la même chose.

Alors, quand quelque chose ne fonctionne pas bien dans les mécanismes de régulation de l'hydratation, on se DESHYDRATE.
La déshydratation peut rapidement avoir de graves conséquences et être même mortelle si elle est trop importante pour des organismes fragiles (bébés, personnes âgées...).

On se déshydrate pour plein de raisons.

Pour faire simple, cela tient à ce que l'on ne boit pas assez ou que l'on perd trop d'eau.
- Ne pas boire suffisamment: surtout en pleine chaleur, lors d'exercice physique important, en vieillissant quand on perd petit à petit l'alerte "avoir soif", lors de maladie inflammatoire, parce que l'on ne peut pas (pas d'eau disponible, paralysie, coma...)...






- Perdre trop d'eau: maladies inflammatoires, vomissements, diarrhée, insuffisance rénale, incontinence urinaire, affections neurologiques, maladies hormonales...

Bref, les causes sont nombreuses...


C'est pour cela que l'on s'attache à chaque consultation à estimer l'état d'hydratation de nos patients.

 - Cela se fait de façon simple pour une approche de première intention, en testant le PLI DE PEAU. En cas de déficit hydrique, l'organisme récupère en premier l'eau se trouvant sous la peau. Cette dernière perd alors son élasticité. Quand on soulève un pli de peau, celui-ci doit normalement revenir instantanément à sa position initiale. En cas de déshydratation, la peau revient à sa position plus lentement. Plus elle revient doucement à plat, plus la déshydratation est importante.
- Quand on veut aller plus loin, on fera une prise de sang afin de déterminer l'HEMATOCRITE. Qu'est-ce c'est que cette bête-là? Prélevez un peu de sang dans un tube contenant un anticoagulant (pour éviter les caillots). Centrifugez-le: les cellules tombent au fond du tube, le plasma (liquide du sang) reste au-dessus.


L'hématocrite est le rapport du volume de cellules ayant sédimenté (en rouge sur mon dessin) sur le volume total de sang (en beige). En pratique, on mesure les hauteurs, soit h/H. On multiplie par 100 pour avoir un pourcentage, plus facile à utiliser.
Il est compris entre 37 et 55% chez le chien, entre 24 et 45% chez le chat.
Si l'animal est anémié, il a moins de globules rouges, h diminue et l'hématocrite diminue. S'il est déshydraté, il a moins de liquide dans son sang, H diminue et l'hématocrite augmente. L'importance de cette augmentation traduit l'importance de la déshydratation.
- Il y a aussi d'autres paramètres que nous prenons en compte mais je ne compte pas vous faire un cours d'école. Sachez toutefois que nous réalisons souvent un IONOGRAMME. Il s'agit du dosage des pricipaux électrolytes du sang: sodium, chlore et potassium. Nous avons choisi d'investir dans un analyseur de dernière génération, ce qui nous donne la possibilité de faire sur place à la clinique. Cela nous permet de corriger rapidement des problèmes graves et d'optimiser les chances de survie de nombreux patients.


Alors: nous avons un animal déshydraté. Comment le remplit-on d'eau?

Si sa déshydratation n'est pas trop grave, la meilleure solution serait qu'il boive tout seul. En effet, l'eau est rapidement absorbée au niveau du tube digestif et la correction peut se faire rapidement et naturellement.
Sinon, il faut envisager de le ré-hydrater. Et alors se posent les questions: Par où? Comment? Avec quoi? Combien?

Par où?

1- Pendant longtemps, on (nous, les vétérinaires) a injecté de l'eau sous la peau. C'était facile, on faisait venir l'animal tous les jours pour lui injecter une bonne quantité de liquide jusqu'à ce que ça aille mieux... Oui, bon, ...mais c'était limité: la diffusion n'était pas bonne, ça faisait de grosses poches sous la peau, on risquait de créer des infections, le débit n'était pas régulier... Bref, on  a mis ça un peu de côté. Ca reste toutefois utile pour de vieux chats ayant une insuffisance rénale (mais dans ce cas, les propriétaires le font eux-mêmes à la maison... Oui, on explique comment faire, bien sûr!) ou pour des animaux difficiles à perfuser: pas mal de reptiles, des petits mammifères, lorsque les veines ne sont pas accessibles en général...
2- La voie intra-osseuse est possible pour de petits animaux, en particulier les chatons, les chiots de petit format, les lapins, mais surtout les cobayes, hamsters, souris, rats, iguanes, et lézards variés...
3- La voie intra-veineuse est la plus courante: Le liquide de réhydratation rentre directement dans le sang par une ouverture réalisée dans une veine.


Comment?

1- Pour la voie sous-cutanée, on utilise généralement des aiguilles à ailettes, appelées aussi "microfuseurs", parce qu'elle sont rapidement retirées et qu'on ne craint donc pas grand chose à laisser une aiguille sous la peau quelques minutes. On branche ensuite une ligne de perfusion (poche de liquide stérile, chambre, régulateur de débit, tubulure, site d'injection, embout).


2- Pour les voies intra-osseuse et intraveineuse, on utilise des CATHETERS: petits tuyaux souples munis d'un guide métallique pointu qui nous aide à pénétrer et qui est retiré par la suite. Ces cathéters peuvent être laissés en place plusieurs jours sous un pansement stérile.
Pour la voie intra-osseuse, on introduit (stérilement, il va sans dire...) le cathéter dans un os long, généralement le fémur que l'on perce au niveau de la tête, près de la hanche. On branche ensuite une ligne de perfusion et tout passe dans la moelle osseuse avant d'aller dans le sang.
Pour la voie osseuse, on place un cathéter dans une veine facilement accessible; patte avant, arrière, parfois veine jugulaire sous le cou ou de l'oreille chez le lapin. Et on branche là encore une ligne de perfusion.

Avec quoi?

Généralement, on utilise des liquides proches du plasma (liquide du sang). Le plasma est proche de l'eau de mer, c'est du chlorure de sodium dans de l'eau: nous perfusons donc du chlorure de sodium la majorité du temps.
Nous avons aussi d'autres solutés à notre disposition que nous utilisons lors d'indications précises: diminution du volume sanguin, hypoglycémie, coma diabétique....
Ces solutés peuvent être "améliorés" en y ajoutant des électrolytes en fonction des déficits estimés suite à l'analyse du ionogramme: potassium essentiellement, parfois bicarbonates...





 

Combien?

Ma foi, cela dépend de l'importance de la déshydratation! Nous estimons les besoins quotidiens de l'animal en fonction de son poids. Nous rajoutons son déficit estimé et les pertes éventuelles par vomissements, diarrhée... que nous devons aussi évaluer subjectivement.
Exemple: chien de 10KG, déshydraté à 5%. Un chien boit environ 50 à 60 ml/Kg/j. Si on dit 50, cela fait: 50 x 10 Kg = 500 ml/24 heures. Nous rajoutons 5 % de 10 KG pour la déshydratation: 500 ml. Cela nous fait... 1000 ml, j'ai bon? Sur 24 H. Et donc ça fait 41 ml pour une heure.
Ensuite, nous avons des pompes à perfusion qui délivrent le volume choisi par heure, ce qui nous simplifie pas mal la tâche! Et qui nous avertissent quand nous arrivons à la fin de la quantité désirée injectée.





Voilà, après un à plusieurs jours de perfusion, notre patient est prêt à rentrer chez lui, guéri... et correctement réhydraté !

 




dimanche 14 juin 2015

LES EFFETS SECONDAIRES DES MEDICAMENTS

Encore pas plus tard qu'hier, une cliente me disait qu'elle n'avait pas osé donné un comprimé entier d'un produit que j'avais prescrit pour son chien, mais seulement un demi- comprimé parce que "dans la notice il y a quand même beaucoup d'effets secondaires et que ça devait être trop fort pour lui."
Bon, c'est vrai, cela nous arrive de nous tromper en rédigeant une ordonnance. Mais c'est quand même exceptionnel ! Et quand on prescrit un médicament particulier et à un dosage particulier, c'est qu'on a de bonnes raisons de le faire. On ne cherche pas à intoxiquer ou à tuer nos patients !
Moralité dans le cas précédent: le traitement ne marche pas. Et pour cause...

Alors , d'où peut bien venir ce manque de confiance? 
En me penchant sur la question, je dirais d'abord que c'est un cas tout de même rare et que la majorité de nos patients suit nos recommandations (ils auraient même plutôt tendance à donner plus pour avoir un effet plus puissant ou plus rapide... ce qui n'est pas mieux non plus...)
Ensuite, il y a des clients qui cherchent à traiter leur animal le plus naturellement possible (comme eux aussi d'ailleurs) et pour qui les médicaments sont des poisons que l'on prend par nécessité: il faut donc en prendre le moins  possible.
Et  puis, on a des clients, heureusement très rares, qui doutent qu'on leur dise la vérité. C'est souvent plus un état d'esprit particulier de crainte de "machinations" : on nous ment, ou on ne nous dit pas  toute la vérité...
Et enfin, il y a les inquiets, souvent d'ailleurs parce que leur animal a une maladie grave, et qui sont prêts à écouter tous les avis divers et variés qu'ils peuvent trouver dans leur entourage proche ou non, sur internet (corne d'abondance d'informations, heureusement souvent véridiques, mais hélas aussi parfois très farfelues) et auprès de non-spécialistes-mais-qui-ont-leur-idée-sur-la-question parce qu'ils travaillent avec des animaux, dans l'industrie pharmaceutique, dans la recherche, dans la médecine humaine, voire dans le paranormal...

Bon, soyons clairs: 
Vous ne croyez quand même pas que, parce qu'on est vétérinaire, médecin ou pharmacien, nous connaissons TOUTES les notices de TOUS les médicaments du marché, ainsi que TOUS leurs effets secondaires? Nous connaissons bien les modalités de leur utilisation, leurs principaux effets normaux et secondaires, ainsi que leur potentielle toxicité selon l'état de nos patients. Mais pas TOUT.
D'abord, une chose importante: il n'y a pas de médicaments FORTS et d'autres moins forts. La force d'un médicament, ça n'existe pas.
Pour une même indication, il y a des médicaments qui peuvent être avoir une action plus importante que d'autres selon leur composition ou leur dosage. Par exemple, pour traiter la douleur, on peut utiliser des anti-inflammatoires, puis des morphiniques si l'on veut plus d'effets. Et avec les morphiniques, on peut augmenter le dosage si l'on veut plus d'effets aussi. Mais la molécule n'est pas plus "forte"
Ensuite, il faut savoir que chaque médicament possède un index thérapeutique: c'est une valeur qui correspond à la marge de sécurité que l'on a en cas de surdosage. Un index thérapeutique de 2 est faible: deux fois la dose recommandée pourrait avoir des effets secondaires sérieux. Un index thérapeutique de 12 est élevé et l'on a une bonne marge de sécurité: si votre chien a mangé toute la plaquette de 10 comprimés à index de 12 au lieu d'un seul, ça risque de ne pas  faire grand chose dans ce cas.
Et l'on a peu de médicaments avec un index thérapeutique faible, heureusement. Ce qui fait que les risques de surdosage sont généralement faibles.

Attention ! Nous ne connaissons pas toutes les notices en détail mais nous ne prescrivons pas au hasard quand même !
Les dosages que nous utilisons sont ceux qui ont été recommandés à la suite d'études scientifiques indiscutables. Le choix du médicament se fait d'abord selon son indication,  puis selon l'effet recherché, enfin selon sa facilité d'emploi et son coût.

Prenons l'exemple d'un patient qui vomit:
1- Nous choisissons un anti-émétique, c'est-à-dire un produit qui va bloquer les vomissements. Logique.
2- Puis, si ses vomissements sont très fréquents ou douloureux, nous allons utiliser une molécule qui aura un effet rapide et puissant, même si elle est plus coûteuse pour notre client. Là, nous privilégions l'efficacité. Si ses vomissements sont peu importants, nous allons utiliser une molécule certes moins efficace mais dont l'effet sera suffisant tout de même et qui sera aussi moins coûteuse
3- Enfin, quand cela est possible, nous allons voir avec notre client s'il préfère donner un médicament liquide ou en comprimés, si le médicament lui semble facile à administrer (taille du comprimé, animal agressif ou non, méfiant ou non...)

A la suite de notre prescription, nous mentionnons les effets secondaires les plus courants, c'est-à-dire ceux auxquels on est en droit de s'attendre. Je pense que si nous mentionnions TOUS les effets secondaires possibles du traitement, personne ne donnerait plus de médicaments !
Tout produit prescrit peut être source d'effets secondaires plus ou moins graves
Alors, oui, des effets secondaires moins fréquents ou rares peuvent survenir. La plupart du temps, ils sont liés à des facteurs individuels, de sensibilité à un produit en particulier.
Dans tous les cas, ces effets sont jugés suffisamment peu graves ou importants pour remettre en question leur utilisation.
En tant qu'acteurs de santé, nous, vétérinaires, devons déclarer à l'ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail: https://www.anses.fr/fr
) tout effet secondaire lié à un médicament prescrit afin de documenter les risques potentiels liés à l'emploi de ce médicament. Si les autorités scientifiques de veille de l'ANSES jugent ces effets secondaires trop fréquents ou présentant des risques réels pour la santé, elles peuvent alors décider de faire cesser la commercialisation de ce produit.

Donc, chers clients, continuez à lire les notices, mais prenez du recul.
Si c'est un médicament fait pour l'homme, la notice mentionne ce qui concerne l'homme; ce qui reflète peu ou rarement ce qui peut se passer chez votre animal.
Si quelque chose vous paraît bizarre dans notre prescription ou si votre animal présente des signes qui pourraient être en relation avec le traitement,  contactez-nous avant de décider d'abandonner le traitement ou de modifier vous-même les dosages. Comme je le disais plus haut, nous pourrions commettre des erreurs de prescription. Et si c'est un effet secondaire réel, il est bon que l'on ré-évalue la prescription rapidement.
Ce qu'a fait Mme Petitpas...